Historique du Bajutsu (ou Ba-Jutsu) « moderne » raconté par Stany LEDIEU – décembre 2022.

 

 

Le Yoseikan Bajutsu – le commencement.

 

Pratiquant d’arts martiaux et sports de combat depuis mon plus jeune âge, j’ai eu l’opportunité de découvrir le Yoseikan Budo lorsque j’ai entamé mes études universitaires en droit à Namur (Belgique).

Très rapidement, et grâce à ma petite expertise dans d’autres disciplines, j’ai pu gravir les échelons et me faire connaître des dirigeants du Yoseikan Budo belge.

En juillet 1992 (du 27 au 31) j’ai pu participer au stage international d’été, dirigé par le Maître Hiroo MOCHIZUKI à Marignane. Ce fut ma 1ère rencontre avec le Maître. Assez inoubliable, puisqu’il m’offrit une de ses armes (n'en déplaise à certains)... que c'était-il passé entre nous pour que je profite d'un tel geste "exceptionnel" !?

Allez savoir pourquoi, quelque chose était passé entre Hiroo et moi. Lors de nos petits échanges, je pris l’occasion de lui faire part de cette grande découverte que fut le Yoseikan, discipline complète selon moi. Hé bien non ! Hiroo me dit que l’école, cette école descendant de la tradition samourai (car une seule discipline – à lire infra dans « évolution de l’école Yoseikan ») serait complète lorsqu’il y aurait les techniques de combat à cheval : le Bajutsu.

Ayant toujours vécu proche des chevaux (mes voisins étant à l’époque des cavaliers renommés en obstacles, champions d’Europe, … dont la fille était mon amie d’enfance avec laquelle je parcourais les concours), c’est tout naturellement que je répondis au Maître que le jour où il voulait créer cette section Bajutsu, qu’il devait m’appeler…

 

A peine deux mois plus tard, l’épouse d’Hiroo, qui s’occupait du secrétariat français du Yoseikan m’appela et m’expliqua qu’Hiroo voulait organiser le 1er stage de Bajutsu près de chez eux (Hiroo vivant à Aix), à Cadenet, chez Jean-Charles ANDRIEUX, le fondateur des Cavaliers-Voltigeurs de France. Je lui ai confirmé que j’y serais. Ce stage fut organisé du 26 au 30 décembre 1992. Déjà 30 ans !! Hiroo qui n’était pas cavalier (bien qu’habitué avec les animaux puisqu’il avait brillamment réussi ses études de vétérinaire au Japon) avait suivi un stage d’initiation aux armes à cheval avec Jean-Yves BONNET (bien connue pour la route du Sel).

 

Quelle expérience formidable. De ma 1ère rencontre avec Hiroo dans un stage de 500 pratiquants, je me retrouvais dans un groupe où nous étions 7 avec le Maître. J’étais le plus jeune, mes collègues étant au moins plus âgés d’une dizaine, voire une vingtaine d’années et tous plus gradés en Yoseikan Budo.

Semaine inoubliable, pour laquelle j’étais accompagné de mon ami d’enfance et toujours à mes côtés : Olivier MATTON (qui fut le 1er Champion de France de Bajutsu le 16 avril 1995 à Cadolive). Rencontre avec le Consul Général du Japon (moment mémorable à de multiples égards), rencontre avec l’organisateur de la Nuit des Arts Martiaux à Marseille pour lequel nous fûmes une démonstration ce qui occasionna à Hiroo de se retrouver à l’hôpital de Pertuis avec 7 côtes cassées suite à une mauvaise appréciation de la vitesse en pleine voltige cosaque. Hé oui, à près de 60 ans Hiroo voltigait comme un jeune homme. Sportif incontesté, je fus même sollicité par les infirmières afin d’obtenir qu’il se « calme » car il s’entrainait dans sa chambre à faire des coups de pieds et autres techniques (deux jours après l’accident – incorrigible Hiroo J).

 

Lors d’un repas, un de mes camarades me demanda si je comptais refaire le Bajutsu en Belgique lorsque je rentrerais ! Ce qui pouvait s’apparenter à un défi devient un véritable challenge lorsque je relevais la tête pour lui répondre et que je croisais du regard à ce moment-là celui d’Hiroo qui se détourna discrètement. Je sus que ma réponse aurait du poids et je répondis « je vais essayer ».

 

De retour en Belgique, je pensais qu’il serait simple de trouver un centre équestre dans lequel je pourrais venir m’entrainer, avec des copains de mon club de Yoseikan (qui ne savaient pas monter à cheval) et en disant qu’on allait tirer à l’arc, lancer le javelot et se battre avec des sabres (même en mousse) … ces 3 disciplines constituant la vitrine du Bajutsu à sa création. Si cela semblait fou, le 1er centre équestre que j’ai visité fut LA découverte pour lancer le Bajutsu en Belgique. En effet, les écuries du Cheval Roy à Mornimont étaient dirigées par Victor GROGNARD, un ancien instructeur de la cavalerie de la Gendarmerie, membre de l’Escorte Royale belge pendant de nombreuses années. Ma proposition a immédiatement plu à Victor qui affectionnait la philosophie des arts martiaux.

Victor s’est largement investi dans la mise en place d’exercices et de techniques.

Le 31 juillet 1993 (jour de la mort de notre Roi Baudoin), je fis la rencontre de Patrice JAMINET (qui deviendra mon alter ego en Bajutsu). Patrice est le plus fidèle pratiquant de Bajutsu. Vous trouverez sa présentation sur le site www.a-n-g-e.eu puisqu’il fut également cavalier à la Gendarmerie et membre de l’Escorte Royale Belge pendant près de 35 ans.

 

Avec Victor, mais surtout avec Patrice nous avons mis en place des techniques. Celles-ci furent « testées » par nos fidèles de l’époque, dont Olivier MATTON (toujours présent bien entendu).

Nous avons ainsi créé les 1es katas, dont Hiroo s’inspirera pour créer Tambo Happo, Ko-bo happo, Katate ken Omote en leur donnant une « touche » plus « Yoseikan ».

Pour finaliser le programme technique, je le présentais à Mario LURASCHI. Si Mario me félicita du travail, il me donna des pistes énormes car je ne souhaitais pas me contenter de ce qui était fait. Merci encore Mario pour cet éclairage qui a rendu le programme plus vaste.

 

Charly (Jean-Charles ANDRIEUX) a joué également un rôle considérable dans ma formation des techniques d’armes et de combats à cheval. Cela m’aura valu de recommencer 2 années d’université (à force d’être plus dans le sud de la France que sur le campus) jusqu’à ce que j’obtienne le statut de sportif de haut niveau en regard des résultats, du début des mes cours pour les services de police à cheval en 1995, … Cela me permit de finaliser mon master en criminologie et de présenter comme sujet de mémoire « le renouveau de l’usage du cheval dans les services de police » (bientôt sur ce site).

 

Nommé responsable du Bajutsu pour la Belgique dès 1993 par Hiroo, puis pour le Benelux, puis pour le Nord Europe, je fus nommé Délégué Technique Mondial pour le Bajutsu en 1999. Nous étions moins de 10 délégués techniques mondiaux au sein de la Yoseikan World Federation à l’époque et j’étais le plus jeune (28 ans) en regard de mes collègues (moyenne d’âge de 40-45 ans).

Voilà comment on se retrouve propulsé sur des stages dans lesquels on vous salue et vous inonde de marques de condescendance car nous sommes encore plus « samourai spirit » en Europe qu’au Japon.

 

Après une série d’anecdotes et relations tumultueuses avec les fédérations successives de Yoseikan, Hiroo me remis le Bajutsu en héritage (SOKE) lors de la Coupe du Monde à Louvain-la-Neuve (Belgique), le 19 mai 2007. Hiroo n’avait jamais eu le temps de poursuivre le développement du Bajutsu durant toutes ces années (ses fils encore moins), j’avais formé de nombreux pratiquants dans différents pays, et surtout, j’avais produit tout le programme technique du Bajutsu qui s’était largement enrichi par rapport à la vitrine de départ. En outre, depuis 1995, j’avais créé, avec Patrice, tout le programme du Bajutsu Special Police (qui évolue encore aujourd’hui à l’instar du « laboratoire Yoseikan), lequel connu une notoriété internationale très rapidement car représentant une nouveauté et quelque chose d’innovant pour les services de police à cheval.

 


Evolution de l’école Yoseikan

 

Durant un peu plus de 10 ans j’ai vu défiler et se succéder les différentes entités en Yoseikan. De 1991 à 2000, ce n’est pas moins de 3 passeports que j’ai obtenu. La valse des fédérations en 10 ans !

CIYB : Centre International de Yoseikan Budo

FMYB :Fédération Mondiale de Yoseikan Budo

Y.W.F. : Yoseikan World Federation

FEYBDA : Fédération Européenne de Yoseikan Budo et Disciplines Assimilées.

Yoseikan Budo France

FFYB : Fédération Française de Yoseikan Budo

FMYBDA : Fédération Mondiale de Yoseikan Budo et Disciplines Assimilées.

Fédération Internationale de Yoseikan Budo et Disciplines Assimilées.

Fédération Belge de Yoseikan Budo

Fédération Belge de Yoseikan Budo et Disciplines Assimilées.

Etc… puisqu’il y a encore de nouvelles entités aujourd’hui.

 

Si nous avons créé dès 1993 la Fédération Belge de Yoseikan Bajutsu, la Yoseikan Bajutsu International Federation a été créée en 2002. Pour créer une telle structure internationale en Belgique il aura fallu une enquête du ministère de la Justice et les signatures du Ministre compétent de l’époque et du Roi. Autant dire que de telles structures sont rarissimes. Il faut au minimum des administrateurs de 3 pays, un nombre minimum d’administrateurs, … Nous avons proposé à Hiroo de reprendre cette structure en lui offrant le poste de président en décembre 2003 alors que d’autres structures Yoseikan étaient vacillantes. 

Finalement, nous avons dissous ces 2 associations en 2015.

La Yoseikan Bajutsu International Federation n’existe plus en tant que telle, ni réellement en association de fait, mais plutôt comme institution morale. C’est elle aujourd’hui qui délivre les diplômes pour les grades puisque les membres du bureau sont toujours « actifs ».

 

 

A titre personnel j’ai choisi de ne plus « cotiser » auprès d’une fédération internationale de Yoseikan Budo à partir de 2001. A cette époque, déjà, les échanges que j'avais avec Hiroo étaient surtout devenus amicaux et essentiellement techniques concernant le programme du Bajutsu que je continuais à parfaire avec mon équipe et ses conseils.


Cette distance prise avec les entités « officielles » n’a pas posé de problème humainement entre Hiroo et moi. Et c’est d’ailleurs parce qu’il y a toujours eu de l’estime et du respect qu’il me légua le Bajutsu en 2007. Hiroo avait bien conscience que le Bajutsu était davantage porté par moi-même que par lui depuis 15 ans, que ni lui ni ses fils (pas assez cavaliers) n'avaient le temps pour le Bajutsu vu le temps qu'il fallait consacré au Yoseikan Budo et aux difficultés rencontrées pour cela.


C’est donc parce qu’il y a cette estime réciproque que le programme technique continue de se référer à l’école YOSEIKAN, l’origine, au Maître et que le kimono restera bleu et blanc tout comme la ceinture (si ce n’est que le hakama se porte à partir d’un certain grade Dan et pas pour se costumer en compétition …).

La signification du mot YOSEIKAN est « maison de l’éducation de l’honnêteté », beaucoup s’en sont éloignés, trop souvent, et s’en éloignent toujours. Est-ce au final réellement cela que le Maître aurait voulu ?!

 

 

Le Bajutsu et la FFE (Fédération Française d’Equitation)

 

Lorsque nous avons créé la Yoseikan Bajutsu International Federation, il y avait plusieurs français dans le conseil d’administration : Michel GAILLET, Laurent BULOT, Jean-Jacques LANGEVIN. C’est ce dernier qui créa l’Association Française de Yoseikan Bajutsu (dont Jean-Jacques LANGEVIN était le Président). Malheureusement il y avait aussi la Formation Française de Yoseikan Bajutsu créée par le Maître. Ce fut toujours rocambolesque.

 

Jean-Jacques, BEES 1, et puis BEES 2 avec notre aide, fit reconnaître le Bajutsu au sein de la FFE (comme ce fut le cas en Belgique pendant 25 ans). Des Championnats de France eurent lieu au Pin jusqu’en 2010. Les juges furent conduits par Patrice JAMINET à une de ces occasions.

La section Tir à l’arc actuelle au sein de la FFE était d’ailleurs la section Yoseikan Bajutsu créée à l’initiative et suite au travail de Jean-Jacques LANGEVIN. On retrouve d’ailleurs les mots « Bajutsu » et « Yoseikan » (souvent mal orthographiés) à différents endroits du site de la FFE.

Aujourd’hui les « experts » fédéraux de cette discipline tir à l’arc sont, pour certains, des anciens élèves de Bajutsu (ou disons qu’ils ont fait l’un ou l’autre stage chez certains des moniteurs que j'avais formés). Pour autant, ils ne peuvent être considérés comme des représentants ou des experts de Ba-jutsu.

Les premiers champions de France en tir à l’arc sont donc issus du Bajutsu.

 

Aujourd’hui la discipline tir à l’arc de la FFE n’a rien à voir avec le Bajutsu.

C’est juste de la compétition, à l’instar de ce qui est mis en avant dans des fédérations sportives. Le tir à l’arc reste au Bajutsu ce que le judo l’est dans les budos, soit une infime partie d’un tout.

C’était la partie visuelle et « facile » d’apprentissage qui permet une commercialisation, de faire des adhérents, de la compétition et de participer au financement de la FFE.

Pour « amuser » la majorité et « rassembler », cette section regroupe aujourd’hui de nombreuses formes de tir à l’arc issues de multiples traditions guerrières aussi éloignées dans le style et géographiquement par rapport aux véritables techniques samourais.

 

Pour rappel :

1ère Coupe de Belgique en 1994.

1er  Championnat de France en 1995.

1er Championnat de Belgique en 2003 (plusieurs rencontres annuelles).

1ère Coupe Internationale en 2005 (France, Belgique, Luxembourg, Italie, Allemagne, Pays-Bas, Taiwan et Suisse).

 

Voir : https://blog.cheval-daventure.com/fr/post/133/tir-a-l-arc-a-cheval-la-discipline-qui-fuse



Le Bajutsu version Ba-Jutsu Ryu, la continuité.

 

Philosophie et orientations de travail du Bajutsu moderne.

 

Le Bajutsu n’est pas une discipline martiale destinée aux enfants car trop dangereuse. Par contre, j’ai développé ce que nous avons appelé les « Bajutsu Games » qui sont des jeux équestres basés sur le Bajutsu à destination des enfants. Cette idée m’est venue après que je sois sollicité en 2009 pour coacher l’équipe belge de poneys games (championne d’Europe en titre) qui était en perte de vitesse. Ce fut un bon échange puisque si nous avons pu transmettre les valeurs martiales à ces cavaliers ainsi que la rigueur et la précision dans leur travail technique, cette idée de « games » porta ses fruits avec notre création pour les plus petits.

 

Si le Maître MOCHIZUKI a « fédéré », et donc nous aussi de facto, auprès des budokas, 30 années d’expérience nous confirment que ce n’est pas le « bon public » à la base. En effet, le Bajutsu, comme son nom l’indique (techniques à cheval), est davantage adapté à un public de cavaliers que de pratiquants d’arts martiaux. Il est plus « facile » de former un bon pratiquant de Bajutsu lorsqu’il est à la base cavalier que lorsqu’il provient uniquement du monde des arts martiaux.

Pour cette raison, le Ba-Jutsu actuel pose des exigences en matière de niveau équestre dès les premiers passages de grades. Il est contreproductif de « donner » des grades à des pratiquants qui savent à peine tenir aux trois allures et seront la risée du monde équestre.

Il est davantage irrespectueux pour le cheval de procéder de la sorte.

La base du Bajutsu demeure le travail avec le cheval. C’est pour cela que le programme est de plus en plus diversifié : travail à pied, à cheval, utilisation de différentes armes mais aussi techniques de combat à mains nues entre cavaliers ou entre cavaliers et fantassins, idem avec armes, … Le travail sur le plat est fondamental et requiert un minimum de connaissance. Si le cheval est un partenaire, il doit être perçu comme tel dans toutes les phases martiales à cheval …  et les potentialités sont énormes quand on a les connaissances utiles et suffisantes en sciences équestres.

 

Toutefois, au même titre qu’on peut envisager des « Bajutsu Games », on peut envisager des initiations au Bajutsu pour les plus grands, pratiquants d’arts martiaux, en cherchant à les sensibiliser à poursuivre dans une voie de cavalier. Ces initiations passeront par l’utilisation de « chevaux factices » (tonneaux métalliques notamment) et du travail au pas avec des chevaux porteurs et bien musclés, ainsi qu’avec des armes non dangereuses. Le travail au trot est à éviter si les cavaliers ne maîtrisent pas leur équilibre afin de préserver le dos des chevaux.

 

 

La pratique du Bajutsu est libre.

 

Chaque cavalier ou budoka peut donc pratiquer le Bajutsu, voire SON Bajutsu.

Avec notre équipe d’instructeurs, nous sommes à la disposition de chacun pour des cours, stages, formations de moniteurs, dans nos installations (sud ouest France) et partout ailleurs (UE et hors UE).

Il n’existe pas de fédération ou association de Bajutsu à ce jour (hormis sous forme « morale » comme décrit supra). Peut-être que cela reviendra avec des adeptes qui souhaiteront mettre en place une telle structure à nouveau sous notre Direction Technique.

 

Chacun pourra s’inspirer des techniques sur ce site internet et passages de grades. Ceux-ci pourront être présentés devant un délégué technique. Attention toutefois que, selon les pays, il faudra détenir un diplôme de moniteur d’équitation pour pouvoir enseigner la discipline auprès du public. C’est par exemple le cas en France qui « protège » les éducateurs sportifs.

 

Ba-Jutsu Ryu signifie « Ecole de Ba-Jutsu », école de techniques à cheval. Notre expertise internationale depuis 30 ans maintenant en techniques équestres militaires, reconnue dans les aspects « opérationnels » et « modernes » du Bajutsu Special Police nous permettent de revendiquer notre propre identité car ce n’est pas le temps mais bien les résultats qui peuvent apporter la crédibilité.